Le concubinage du débiteur impacte l’appréciation de la prestation compensatoire
Lorsqu’un juge fixe une prestation compensatoire, il doit tenir compte de nombreux éléments, parmi lesquels la situation de concubinage du débiteur. Une récente décision de la Cour de cassation le rappelle avec force : le concubinage constitue un facteur susceptible de modifier la disparité entre les conditions de vie des ex-époux.
Dans l’affaire jugée, des époux divorcent et l’ex-épouse sollicite le versement d’une prestation compensatoire. Elle soutient notamment que son ex-mari vit en concubinage depuis leur séparation, ce qui devrait être pris en considération dans l’évaluation de la disparité.
La cour d’appel rejette cette demande en se limitant à comparer les revenus et charges respectifs : Monsieur perçoit 3 017,31 € de retraite contre 3 080,17 € pour Madame (revenus divers), et assume 1 629,87 € de charges mensuelles, bien supérieures à celles de son ex-épouse (441,50 €). En outre, il ne dispose d’aucun patrimoine immobilier, contrairement à elle.
Une erreur selon la Cour de cassation. Dans son arrêt (Cass. 1re civ., 17 sept. 2003, n° 01-16.249 ; Cass. 1re civ., 27 juin 2018, n° 17-21.919), la Haute juridiction rappelle que les juges du fond ne peuvent se contenter d’analyser les seuls revenus, charges et patrimoines. Ils doivent aussi rechercher si la situation de concubinage du débiteur influe sur la disparité des conditions de vie.
En effet, le concubinage peut modifier l’équilibre financier d’un ex-époux, dès lors que le concubin prend en charge certaines dépenses courantes. Cela réduit mécaniquement les charges supportées par le débiteur et peut donc atténuer la disparité initialement constatée.
Cette approche est bien établie. Elle s’applique dans les deux sens : la situation de concubinage du créancier doit également être prise en compte (Cass. 1re civ., 25 avr. 2006, n° 05-15.706 ; Cass. 1re civ., 4 juill. 2018, n° 17-20.281). Le principe est le même : la vie commune avec un tiers allège les charges et modifie l’appréciation de la situation économique de l’intéressé.
En pratique, les parties doivent veiller à porter à la connaissance du juge toute évolution de leur situation personnelle, y compris un éventuel concubinage. Le juge, quant à lui, doit intégrer cet élément dans son analyse afin de garantir une décision équitable et conforme à l’article 270 et 271 du Code civil.
Ce rappel jurisprudentiel souligne l’importance d’une appréciation globale et actualisée de la situation des ex-époux lors de la fixation d’une prestation compensatoire.